Xylella fastidiosa, une menace pour les oliviers et des centaines de plantes
Xylella fastidiosa est une bactérie phytopathogène de quarantaine pouvant infecter plus de 600 espèces de plantes et impacter des filières agricoles majeures telles que la vigne, les agrumes, l’amandier, l’olivier, mais également des plantes aromatiques, ornementales, forestières et sauvages. Aucun moyen de lutte curative contre cette bactérie n’existe à ce jour. De ce fait, pour éviter la propagation de la maladie, l’arrachage et la destruction des plantes contaminées et la lutte contre les insectes vecteurs sont indispensables. Point sur la bactérie et les missions du Laboratoire de la santé des végétaux (LSV) de l’Anses pour contribuer à la lutte contre cet organisme nuisible.
Qu’est-ce que Xylella fastidiosa ?
La bactérie Xylella fastidiosa, en se développant dans le xylème d’une plante produit des agrégats ou biofilms, bloquant les mouvements de la sève brute au sein des vaisseaux.
Cette bactérie est transmise par des insectes vecteurs piqueurs-suceurs. Une trentaine d’espèces de cicadelles se nourrissent de la sève brute du xylème et peuvent donc potentiellement transmettre la bactérie en France. Quatre espèces sont beaucoup plus fréquentes dans ou aux abords des milieux cultivés et l’une d’entre-elles, Philaenus spumarius, le cercope des prés, est un vecteur avéré en Europe.
Xyllela fastidiosa attaque près de 600 espèces végétales appartenant à plus de 80 familles botaniques différentes : vigne, agrumes, arbres fruitiers, amandier, olivier, cerisier, caféier, avocatier, luzerne, laurier-rose, chêne, érable, etc.
Actuellement, il n'existe pas de moyens curatifs pour lutter contre cette bactérie. La réglementation européenne visant à empêcher l'introduction et la propagation de la bactérie sur le territoire, préconise l'arrachage et la destruction des plants contaminés, ainsi qu’une surveillance renforcée.
Au sein de l’espèce Xylella fastidiosa, cinq sous-espèces sont distinguées à ce jour : fastidiosa, multiplex, morus, pauca, sandyi. Elles n’attaquent pas les mêmes végétaux et présentent des degrés de virulence variables.
Quels sont les symptômes ?
Les symptômes provoqués sont peu spécifiques : flétrissement, nécrose et brûlure des feuilles ou des rameaux. Ils peuvent apparaître tardivement (phénomène de latence), ou ne pas apparaitre (plante asymptomatique). Ils peuvent se répartir de façon non homogène dans la plante, altérer la production de fruits et être suivis de la mort de la plante dans les cas les plus graves. En fonction des plantes, on peut observer :
- des brûlures foliaires et dans les stades plus avancés, un desséchement des rameaux ;
- des chloroses foliaires ;
- un nanisme de la plante ;
- un port tombant et une réduction des entrenœuds ;
- un jaunissement et un rougissement des feuilles.
Xylella fastidiosa en Europe : des situations variées
Un premier foyer de Xylella fastidiosa sur oliviers, lauriers rose et amandiers a été déclaré en 2013 dans la région des Pouilles, en Italie. La situation a évolué très rapidement en une épidémie avec une expansion de type exponentielle dans les vergers d’oliviers. La souche responsable appartient à la sous-espèce pauca de X. fastidiosa. (Xylella fastidiosa subsp pauca De Donno). Dans le cadre de la surveillance renforcée mise en œuvre par les services de l’Etat français, en 2015, le premier cas détecté en France l’a été en Corse par le Laboratoire de la santé des végétaux de l’Anses (unité "bactériologie, virologie, OGM" à Angers), suite à une suspicion forte de Xylella fastidiosa sur un arbuste de Polygale à feuilles de myrte (Polygala myrtifolia), situé dans une zone commerciale de la commune de Propriano. Ce plan de surveillance déployé sur tout le territoire national a permis de montrer que la bactérie était présente en Corse et dans la région PACA en 2015 et vraisemblablement avant.
La situation n’est pas comparable à celle de l’Italie où la maladie est due à la propagation rapide d’une souche unique très agressive sur olivier. La contamination des régions françaises serait due à plusieurs introductions durant les années 80. Les souches de Xylella fastidiosa isolées en France appartiennent principalement à la sous-espèce multiplex en se partageant entre sequence type ST6 et ST7.
En septembre 2019, l’Anses a confirmé pour la première fois en France la présence de la bactérie sur deux oliviers de la région PACA (Menton et Antibes) détectés positifs par le laboratoire agréé : l’un contaminé avec la sous-espèce pauca présentant un profil équivalent à celui de la souche présente dans le Sud de l’Italie, l’autre contaminé avec la sous-espèce multiplex. Récemment, depuis l’été 2020, de nouveaux foyers ont été détectés en région Occitanie, en premier lieu sur lavande au sein d’une pépinière puis dans l’environnement sur lavande, romarin, genêt, la liste s'allongeant au fur et à mesure des investigations. Ainsi, en octobre 2021 et dans le département du Gard, un premier pied de spartier (Spartium junceum) a été détecté positif à la bactérie.
Depuis 2016, l’Espagne a mis en évidence la présence de plusieurs sous-espèces de Xylella fastidiosa sur une large gamme de plantes hôtes dans les iles Baléares puis sur le continent, la sous-espèce multiplex (Sequence type ST6) causant d’énormes dégâts dans les vergers d’amandiers de la province d’Alicante. Cette même sous-espèce a également été identifiée au Portugal bien que le génotype soit différent (ST7) de celui présent dans les vergers du Sud-Est de l'Espagne.
Surveillance du territoire : le rôle de l’Agence
Deux unités du Laboratoire de la santé des végétaux (LSV) de l’Anses sont impliquées. L’unité "bactériologie, virologie, OGM" a développé, en suivant un processus de validation, la méthode officielle pour la détection de Xylella fastidiosa utilisée dans le cadre de la surveillance du territoire par les laboratoires agréés. L’unité "entomologie et plantes invasives" a rédigé un protocole d’identification des vecteurs potentiels pour la mise en place du plan de surveillance vectorielle. Ces unités organisent également la formation et le suivi des laboratoires agréés et sont en charge d’effectuer les analyses de confirmation. Au sein du Laboratoire de Lyon, l'unité ‘’évaluation et appui à la surveillance’’ contribue à l’épidémiosurveillance en compilant et analysant les données d’occurrence des foyers. Elle établit des cartes actualisées de répartition de la maladie, disponibles sur le site du ministère de l’Agriculture et exploitées par la plateforme d’épidémiosurveillance de santé végétale (ESV).
Enfin, dans le cadre de la plateforme nationale d’épidémiosurveillance en santé végétale, coordonnée par la DGAl, INRAE et l’Anses, le LSV est impliqué dans le groupe de travail dédié à la surveillance de la bactérie, et dans la co-coordination de ce groupe de travail impliqué dans l'appui à la surveillance des zones de foyers existants et la détection précoce des introductions.
Développement méthodologique et recherche : l’implication de l’Agence
Le LSV travaille en continue à l’amélioration de la sensibilité et de la fiabilité des méthodes de détection sur les espèces végétales hôtes de cette bactérie et sur les insectes vecteurs, y compris en envisageant l’utilisation de nouvelles techniques moléculaires telles que la PCR digitale.
En partenariat avec INRAE et dans le cadre de programmes de recherche européens H2020, le LSV travaille à la standardisation des méthodes de caractérisation des souches présentes sur les territoires français et européen et collabore à l’étude de la structure des populations dans l’espace et de leur dynamique afin d’identifier et de caractériser les routes d’invasion de la bactérie Xylella fastidiosa. Par ailleurs, le LSV a réalisé une étude pour mieux connaître la liste des vecteurs potentiels présents en cultures ou dans l’environnement et leur répartition en France, avec la collaboration de différents partenaires nationaux.